Apartés - Le Jeu de l'amour et du hasard, II, 4
Scène 4 de l'acte II
Monsieur, pourrais-je vous entretenir un moment ?
Arlequin
(A part) Ciel, le revoilà, il faut vite que je l'éloigne avant qu'il ne m'écarte de la douce. Je vais faire le maître; après tout, c'est le rôle qu'on m'a donné...
(Haut.) Non ; maudite soit la valetaille qui ne saurait nous laisser en repos !
Voyez ce qu’il nous veut, monsieur.
Quelle autorité a cet homme-là! Il tient son valet comme un paysan tient son chien!
Le drôle profite de la situation pour se montrer insolent. Mais il le paiera quand le jeu sera fini! Gare à ses épaules!
(Haut.) Je n’ai qu’un mot à vous dire.
Madame, s’il en dit deux, son congé sera le troisième. Voyons.
Dorante
Le faquin, le maraud, il m'en coûte de le voir pérorer avec elle ! A-t-elle si peu de goût qu'elle ne s'apercoit de rien ?
(Plus bas à Arlequin.)
Viens donc, impertinent.
Ce sont des injures, et non pas des mots, cela… (à Lisette.) Ma reine, excusez.
Faites, faites.
Ma reine! Quel raffinement dans le compliment ! Je crois bien que Dorante m'a déjà conquise et je suis prête à lui accorder tout ce qu'il voudra.
Débarrasse-moi de tout ceci ; ne te livre point ; parais sérieux et rêveur, et même mécontent ; entends-tu ?
Voilà qui devrais mettre fin à cette comédie !
Oui, mon ami ; ne vous inquiétez pas, et retirez-vous.
Ah ! Il peut bien compter là-dessus mais je sens que ma fortune est proche, a belle n'est point farouche. De plus, elle a quelques charmes que je goûte fort !